Antoinette Roze

Je suis tourangelle, issue d’une famille de soyeux, installée dans cette ville depuis le XVIIème siècle

Mlle Antoinette ROZE, votre entreprise Jean ROZE est l’un des membres français de l’Association les Hénokiens, pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ?

> Antoinette ROZE : Je suis tourangelle, issue d’une famille de soyeux, installée dans cette ville depuis le XVIIème siècle.
J’ai toujours vu mon père travailler dans son atelier, où moi-même je gagnais mon argent de poche. Seules les demandes de mes institutrices me faisaient comprendre que le métier de mon père n’était pas comme celui des autres parents. Il fallait que j’apporte des morceaux de tissus et que je parle de la soie.
Ce n’est que peu à peu, voire tardivement, que j’ai pleinement pris conscience de la particularité de ma famille et de son histoire.
J’ai repris l’entreprise à la mort de mon père en 1986.

 Pouvez-vous nous présenter votre entreprise et ses activités ?

> AR. : La fabrication de soieries s’est spécialisée dès le XIXème siècle dans les étoffes pour ameublement, secteur qui permet de faire des fabrications sur mesure, de la haute qualité et de la petite série. Autant de spécificités mieux adaptées à notre entreprise de petite taille et éloignée des autres régions textiles.

Quels sont pour votre entreprise les faits marquants de ces dernières années ?

> AR. : L’ouverture d’un atelier de teinture en 2000. Cette activité est étroitement liée à celle du tissage tout en étant à l’opposé sur un plan technique.
La fermeture de l’atelier d’un sous-traitant local nous a conduit à le remplacer nous-mêmes, l’éloignement des autres ateliers rendant très difficiles les échanges qui sont quotidiens.
L’autre fait marquant est la labellisation de l’entreprise aux Entreprises du Patrimoine Vivant en 2006.

Pouvez-vous nous dire quelques mots sur vos projets majeurs à plus ou moins long terme ?

> AR. : J’ai deux priorités : travailler sur le développement de nouveaux tissus et l’enrichissement de la collection que nous proposons à notre clientèle. D’autre part, travailler sur la transmission des savoirs au sein de l’entreprise.

 Quelles sont les raisons qui peuvent expliquer la longévité de votre entreprise ?

> AR. : Notre entreprise a eu la chance d’avoir à sa tête la bonne personne au bon moment. Ces personnes étaient passionnées et étaient avant tout des fabricants de soieries avant d’être des entrepreneurs.

 L’extraordinaire longévité de votre entreprise constitue-t-elle un argument dans la relation avec vos clients ?

> AR. : Cela apporte de la crédibilité, surtout lorsqu’on appartient au secteur de la décoration et des métiers d’art qui demande, au travers des attentes du public, maîtrise de la tradition et des savoir-faire qui nous viennent des périodes passées et qui sont gage de qualité.

Les valeurs traditionnelles qui font la force de votre entreprise constituent-elles également un atout en matière de recherche et d’innovation ?

> AR. : C’est très important, surtout quand il s’agit de travailler dans le secteur des monuments historiques ou équivalents (notamment à l’étranger).

Quels sont, selon vous, les pièges les plus importants auxquels votre entreprise doit faire face pour conserver son indépendance ?

> AR. : Assurément être attentif à l’origine des capitaux dont on peut avoir besoin et ne pas dépendre de structures qui ne portent aucun intérêt à votre activité.

La volonté de votre famille de garder l’entreprise indépendante a-t-elle nécessité au fil des siècles des choix difficiles. Si oui, pouvez-vous nous en citer quelques uns ?

> AR. : Il n’y a jamais eu de choix à faire entre plusieurs successeurs possible. Il s’agissait plutôt d’un non-choix de la part des personnes qui ont pris la succession. C’est vrai, assurément, pour les 5 dernières générations, dont la mienne.

La transmission de votre entreprise à un membre de votre famille est-elle régie par des règles clairement établies ?

> AR. : Ne pas contraindre et s’assurer des compétences des héritiers possibles.

La nouvelle génération est-elle déjà dans l’entreprise ?

> AR. : Non. 

Auriez-vous un message à communiquer à toutes celles et ceux qui voudraient se lancer dans la création de leur entreprise familiale ?

> AR. : Etre passionné, ne pas créer une entreprise dans le seul but de créer une entreprise, mais porter un projet, maîtriser une compétence qui sera le cœur de métier de l’entreprise.